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La période d'essai, amie ou ennemie de notre santé mentale ?

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Bien qu’elle ne soit pas obligatoire d’un point de vue réglementaire, la période d’essai est pratiquée par l’écrasante majorité des entreprises françaises. Vécue comme une source de précarisation par les uns, ou au contraire une porte de sortie indispensable par les autres, elle divise autant qu’elle rassemble les points de vue.

En 2019, tous secteurs confondus, 19% des CDI ont été rompus durant la période d’essai*, sachant que 42% de ces ruptures sont liées à des démissions, soit leur motif principal (source : DARES). Toutefois, même si l’employé est à l’origine de la fin de l’aventure, impossible de nier le stress généré par la période d’essai. Déjà, parce que comme toute nouveauté, la période d’essai est irrémédiablement coûteuse pour le cerveau humain, et plus globalement notre organisme, qui, par instinct de survie, essaie de dépenser le moins d’énergie possible. Ensuite, parce que d’un point de vue psychologique, la période d’essai peut déclencher de nombreuses peurs chez les individus, à commencer par celle de l’échec. “Chaque prise de poste comporte son lot d’incertitudes. On connaît nos missions en théorie mais pas en pratique, on peut aussi craindre de ne pas s’intégrer au groupe, à un nouvel écosystème”, pointe Louise Pereira, psychologue pour moka.care. Des peurs qui peuvent être décuplées par un onboarding à distance ou encore lorsque l’on change d’entreprise pour gagner en responsabilités. “On peut craindre de s’être survendu, ce qui peut titiller le syndrome de l’imposteur jusqu’à ce que la prise de poste accentue ou diminue ces peurs”, poursuit notre experte. 

Une appétence au changement variable d’un individu à l’autre

Pour autant, nous ne sommes pas tous égaux face à ces doutes. Pour certains, le changement est au contraire une source de motivation. “Pour progresser, le cerveau a besoin de sortir de la routine. Or, on observe que chez certains individus, l’appétence pour la nouveauté est beaucoup plus forte que pour d’autres”, explique le Dr Bernard Anselem, médecin consultant en neurosciences et co-auteur de l’ouvrage Les talents cachés de votre cerveau au travail (Eyrolles). Le témoignage d’Olivier*, Head of sales, en est l’illustration : “je n’ai pas hésité à quitter un job lors d’une période d’essai parce que je ne me sentais pas de rester dans cette entreprise niveau management. Cela ne m’a pas spécialement angoissé. Au contraire, je trouve que c’est un avantage de pouvoir partir d’un moment à l’autre sans préavis”, lance-t-il. 

Toutefois, comme l’explique Louise Pereira, cette posture “relâchée” face à la période d’essai est également dépendante de facteurs psychosociaux et de l’histoire personnelle, ce que nous confirme d’ailleurs Olivier. “J’ai longtemps travaillé en Colombie où l’on peut se faire licencier du jour au lendemain. Finalement, la sécurité du CDI est quelque chose de très français”, observe-t-il. Il ajoute que son niveau d’expérience et le marché dans lequel il évolue lui ont également permis d’être plus serein quant à son employabilité future. 

Et si on supprimait carrément la période d’essai ? C’est le pari de certaines entreprises françaises qui expliquent ne pas vouloir précariser inutilement leurs collaborateurs, affichant une confiance totale dans leur process de recrutement, et l’intégration des nouveaux arrivants grâce à une forte documentation de la culture d’entreprise. Et, parce que l’erreur est humaine, ces entreprises croient en la formation pour rattraper d'éventuelles lacunes, sans compter qu’une rupture conventionnelle peut toujours être proposée. “De plus, la suppression de la période d’essai permettrait d’être plus attractif sur un marché pénurique”, relève Caroline Diard, professeure associée au sein de TBS éducation.

Un risque de surmenage à ne pas sous-estimer

Finalement, le stress durant la période d’essai est une combinaison de facteurs intrinsèques et extrinsèques, comme en témoigne parfaitement Jeremy Tene, Senior people success partner chez Openclassrooms, lui-même en période d’essai à l’heure actuelle. “Quand j’étais plus jeune, je cherchais à faire valider ma période d’essai rapidement plutôt parce que j’étais en quête d’une forme de valorisation de la part de mon employeur. Maintenant, c’est totalement différent. Je mets les bouchées doubles pour l’écourter car j’ai un projet immobilier que je souhaite mener”, nous confie-t-il.

En tant que professionnel des ressources humaines, il tient donc à souligner le risque de surmenage inhérent à la période d’essai, pouvant engendrer du stress et des signaux faibles de burn-out. Un point également relevé par Louise Pereira : “en période d’essai, on est tenté d’aller au-delà de ses limites, avec le risque d’ancrer ce mécanisme sur la durée parce que l’employeur a été habitué à ce rythme et que les limites n’ont pas été bien posées”, estime-t-elle, invitant plutôt les salariés en période d’essai à jouer franc-jeu dès l’entretien de recrutement pour s’assurer qu’ils sont en phase avec la culture d’entreprise.

Période d'essai : des renouvellements abusifs ?

Si la période d’essai peut s’avérer stressante, elle l’est d’autant plus dans les entreprises qui pratiquent son renouvellement automatique. “Aujourd’hui, on peut aller jusqu’à 8 mois de période d’essai pour un cadre, renouvellement inclus, ce qui est très long pour un salarié et peut déséquilibrer voire briser le contrat psychologique qui lie le collaborateur à son entreprise. La confiance peut être rompue. L’employé peut alors se démotiver car il a la sensation de prendre des risques et de s’engager contrairement à l’employeur”, pointe Caroline Diard.  

Une pratique que l’on retrouve très fréquemment dans les start-ups où la période d’essai sert de variable d’ajustement pour pallier une santé financière parfois branlante, ou encore en raison d’une mauvaise définition de la fiche de poste. De manière empirique, on estime que le taux de rupture de la période d’essai est de 50% dans cet écosystème, un record. “Les salariés peuvent être déçus par une restructuration ultérieure, ou le fait qu’on leur demande d’exécuter le job de trois personnes en même temps. Ajoutez à cela un management souvent peu mature, un fort taux de turnover et un onboarding pas toujours très bien pensé, et vous aurez le cocktail parfait d’une période d’essai particulièrement stressante”, observe Selma Chauvin, CMO chez Skillup. 

Toutefois, notre interlocutrice concède qu’il est compréhensible qu’une start-up prenne ses précautions en renouvelant la période d’essai, parce qu’elle prend plus de risques en embauchant des gens. De plus, après avoir évolué au sein d’un grand groupe de 15 000 salariés, Selma observe d’autres difficultés inhérentes aux mastodontes. Certes, leur onboarding est bien structuré, mais la prise en main du poste peut être extrêmement longue, à l’inverse d’une start-up qui exige d’être immédiatement opérationnel : “Une bonne partie du travail durant l’onboarding consiste à comprendre comment on va pouvoir faire son job “pour de vrai”, parce qu’il est notamment très difficile d’identifier qui fait quoi. De plus, si on reprend un poste et que les autres collaborateurs en avaient une mauvaise perception, il peut être difficile de changer cette image”, souligne-t-elle. D’autres défis à relever pour le collaborateur !

Que dit la loi ? Ce sont les articles L1221-19 et suivants du code du travail qui encadrent la période d’essai. Elle permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent. La période d’essai est renouvelable uniquement si les trois conditions cumulatives suivantes sont respectées : 

-Le renouvellement est prévu par la convention ou l’accord de branche 

-Le contrat de travail ou la lettre d'engagement prévoit la possibilité de renouveler la période d’essai 

-L’employeur et le salarié donnent leur accord  pendant la période d'essai initiale, par écrit ou par mail.

Légalement, le renouvellement automatique de la période d’essai, sans motif valable, est donc interdit. La période d’essai ne doit pas être utilisée comme une variable d’ajustement, auquel cas il faut lui préférer le CDD qui inclut le versement d’une prime de précarité en fin de contrat (ce qui explique pourquoi il n’est pas toujours utilisé). 

Comment accompagner au mieux les collaborateurs durant la période d’essai ?

1. Ne pas oublier que la séduction se joue des deux côtés

Pour ne pas créer dès le départ de déséquilibre dans la relation, il est essentiel selon Jeremy Tene de “bien insister sur le fait que l’employeur n’a pas droit de vie ou de mort sur le collaborateur, et que c’est aussi à l’entreprise de faire ses preuves pour retenir la recrue”. Une phase de séduction également évoquée par Selma Chauvin qui ose un parallèle avec une relation amoureuse : “on sait bien que tout ne sera pas rose par la suite, mais si on ne ressent pas de papillons dans le ventre dès le démarrage, c’est mal parti”. La période d’essai est donc comme une lune de miel qui doit permettre de s’éprouver mutuellement, tout en posant de solides fondations. 

2. Confirmer dès que possible 

Et pour ferrer encore davantage la relation, il est important que l’employeur apporte des preuves de reconnaissance durant cette période. “Confirmer un collaborateur avant la fin de sa période d’essai est un bon marqueur, quelque chose dont le salarié se souviendra, comme s’il avait été identifié comme un talent par son entreprise”, estime Jeremy Tene. Et si la période d’essai doit être renouvelée parce que des doutes subsistent, il faut alors prendre le temps d’expliquer ce qui bloque et le chemin que le collaborateur doit emprunter pour valider sa période d’essai. A noter que le collaborateur lui-même peut également demander à prolonger sa période d’essai s’il a des doutes.

3. Peaufiner l’onboarding

Pour accompagner au mieux les collaborateurs durant la période d’essai, il est également indispensable de bétonner l'onboarding, et ce, dès la phase de recrutement, en apportant de la clarté sur le scope du poste, et en établissant un plan des attendus à J+15, +30, +90, etc. “Je recommande de démarrer par des quick wins pour mettre le collaborateur en confiance. Mais le plus important est de lui permettre de rencontrer un maximum de personnes dans l’entreprise, plutôt que de lui faire ingurgiter de la documentation”, recommande Selma Chauvin. 

4. Penser au préboarding

Pour que l’onboarding se passe au mieux, on peut aussi miser sur une pratique encore trop peu exploitée : le préboarding. Il consiste à faciliter l’arrivée du collaborateur en l’intégrant à des événements comme des offsites, en l’invitant à déjeuner avec l’équipe, ou encore en lui ouvrant l’accès à des données sur l’entreprise avant même sa prise de poste. “C’est ce que mon employeur m’a offert avant même mon arrivée. Du coup, lors de mon premier jour, c’était beaucoup plus confortable, déjà parce que je savais que j’avais quelques copains avec qui déjeuner le midi”, se réjouit Selma Chauvin. On peut aussi miser sur les systèmes de mentors et de buddies pour permettre au salarié de poser toutes les questions qui lui passent par la tête, y compris les plus basiques comme la date de paiement du salaire. “Il est pertinent également de prévoir un entretien en fin de période d’essai afin de permettre au nouveau collaborateur de faire part de ses impressions (une forme de rapport d’étonnement pourrait également être envisagée)”, recommande Caroline Diard.

5. Outiller les managers

Pour ne pas faire traîner la prise de décisions pour valider la période d’essai (et donc ne pas laisser le collaborateur dans cette incertitude qui peut le stresser), Jeremy Tene insiste pour sa part sur la nécessité d’outiller au maximum les managers : score card, rappel des dates d’échéances, réunion à 360 pour décider collectivement… “Il est important que le manager objective sa prise de décision et ne se fonde pas seulement sur son feeling”, insiste-t-il.

6. Ne pas oublier… d’écouter !

Dernier petit conseil pour la route : pratiquer l’écoute active en tant que RH ou manager. “Il faut encourager voire tenir la main du salarié au démarrage, et se mettre dans une posture qui ouvre le dialogue. Pour y parvenir, il faut faire attention au vocabulaire que l’on emploie quand on s’adresse à un salarié, afin qu’il n’ait pas l’impression d’être juste là pour produire de la valeur, mais aussi pour s’épanouir dans son métier”, recommande Louise Pereira. Ce travail d’écoute peut être doublé de sessions psy ou de coaching mises à disposition des salariés auprès de professionnels extérieurs à l’entreprise. C’est ce que nous pratiquons en interne, et ce que nous vous proposons pour vos collaborateurs. 

Paulina Jonquères d’Oriola

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